vendredi 3 juillet 2015

En Touraine, une visite au "Pressoir" de Chédigny (juin 2015)










Textes et photographies 
de Liliane Jouannet 



Dans cette deuxième quinzaine de juin, plusieurs sculptures de Francis Piquot ont été exposées dans une belle salle du "village des roses" (le Pressoir de Chédigny, en Indre et Loire) ; elles étaient en excellente compagnie, avec des œuvres des peintres Catherine et  Rémy Gendre...

Il s'est créé de façon improvisée, des "correspondances"  entre les parfums, les couleurs et... les formes, pour paraphraser le célèbre vers de Baudelaire :

"Comme de longs échos qui de loin se confondent
Dans une ténébreuse et profonde unité,
Vaste comme la nuit et comme la clarté,
Les parfums, les couleurs et les sons se répondent."
("Correspondances")

Nous aimerions partager, 
avec quelques images, et quelques vers des Fleurs du Mal,
 la magie de cette visite.


Entrée du Pressoir : les portes vitrées reflètent
l'autre côté de la rue

Dans la rue, les parfums...




A l'intérieur, les parfums, les couleurs et... les formes se répondent... 


**********************
En voici des échos :


F. Piquot, Pénitente
"O moine fainéant ! quand saurai-je donc faire 
Du spectacle vivant de ma triste misère
Le travail de mes mains et l'amour de mes yeux ?"

 ("Le Mauvais Moine")



















F. Piquot, Confuse envie d'essor



"A te voir marcher en cadence,
Belle d'abandon,
On dirait un serpent qui danse
Au bout d'un bâton.

Sous le fardeau de ta paresse
Ta tête d'enfant
Se balance avec la mollesse 
d'un jeune éléphant [...]"

("Le Serpent qui danse")












F. Piquot, Dépouilles d'hoplite et,
à l'arrière-plan, Corselet






"Deux guerriers ont couru l'un sur l'autre; leurs armes
Ont éclaboussé l'air de lueurs et de sang."

("Duellum")














F. Piquot, Trépied



"[...] c'est Satan trismégiste*
Qui berce longuement notre esprit enchanté,
Et le riche métal de notre volonté
Est tout vaporisé par ce savant chimiste."

( "Au lecteur")


* trismégiste : adj. d'origine grecque ("trois fois très grand"), désignant d'ordinaire un "Hermès" égyptien, fondateur légendaire de l'alchimie. 















F. Piquot, Toutes voiles dehors, et
à l'arrière plan, Peste soit!



"Pour soulever un poids si lourd,
Sisyphe, il faudrait ton courage !
Bien qu'on ait du cœur à l'ouvrage,
L'Art est long et le Temps est court."


("Le Guignon")

















F. Piquot, Haute couture



"Que c'est un dur métier que d'être belle femme..."

("Confession")
















F. Piquot, Victoire



"Une île paresseuse où la nature donne
Des arbres singuliers et des fruits savoureux;"

("Parfum exotique")






























F. Piquot, Douve de foudre 





"Un Ange, imprudent voyageur
Qu'a tenté l'amour du difforme,
Au fond d'un cauchemar énorme
Se débattant comme un nageur, [...]"

("L'Irrémédiable")



N.B. : Pour l'aperçu de l'"Ange"
voir l'interprétation suggérée
dans le message précédent du blog...









Les Hiboux
F. Piquot, Frémissement

Sous les ifs noirs qui les abritent,
Les hiboux se tiennent rangés,
 Ainsi que des dieux étrangers
Dardant leur œil rouge. Ils méditent.

Sans remuer ils se tiendront
Jusqu'à l'heure mélancolique
Où, poussant le soleil oblique,
 les ténèbres s'établiront.

Leur attitude au sage enseigne
Qu'il faut en ce monde qu'il craigne
Le tumulte et le mouvement.

L'homme ivre d'une ombre qui passe
Porte toujours le châtiment
D'avoir voulu changer de place.





F. Piquot,  A la mode Erato (1er plan) et
Statif (2e plan)

"Nous aimions cette humble musique
Si douce à nos esprits lassés
Quand elle vient, mélancolique,
Répondre à de tristes pensers."

(Poèmes divers, "Incompatibilité, IV")


***************************

En quittant cette salle, un dernier regard
sur l'ensemble :
le tableau de Rémy Gendre, 
astucieusement suspendu,
ne laisse pas de nous intriguer...



Rémy Gendre, Arrêt sur image


Voici les quelques lignes qu'il m'inspirera le lendemain :

Ma rencontre avec l'Ange
L'Ange avait été envoyé, comme d'habitude.
Le voyage avait bien commencé, à travers l'espace et le temps. Le ciel, la terre, l'Italie, ah ! l'Italie...
Et puis quelque chose s'est détraqué. L'air, soudain moins bleu, moins léger - ou alors trop, on ne sait.
Les ailes ne furent plus soutenues, et ce fut le "choc" étrange, contre du mou, contre du flasque.
Lui, d’ordinaire, il fait "Annonciation" ou "Nativité". Il traverse les murs. C'est lui qui surprend, et l'on s'agenouille devant lui. Il a l'habitude de dominer la situation, avec grâce.
Mais là, s'il pouvait voir ce que l'"arrêt sur image" permet de comprendre de l'accident, il saurait qu'il se fracasse sur une meule de foin, abritée sous un hangar, et protégée par une bâche en plastique transparent - plastique fin, ce n'est peut-être qu'"un film".
Film ? Plastique ? trop de mots inconnus : cet Ange n'a rien à faire dans ce monde où on ne l'attend plus. Dieu a dû mourir entre temps, et la peinture aussi, une certaine peinture... Désormais, on ne veut plus de lui.
Le peintre a eu pitié, il ne nous a pas montré la mort de l'Ange.

L. J.
21 juin 2015

*************************

Les artistes (de gche à drte) : Rémy et Catherine Gendre, peintres,
Francis Piquot, sculpteur.
Photo Nouvelle République (détail)

du 23/06/2015.
Voir
http://www.lanouvellerepublique.fr/Indre-et-Loire/Communes/Ch%C3%A9digny/n/Contenus/Articles/2015/06/23/Peintures-et-sculptures-au-Pressoir-2376793




Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire